MYSTIQUE DE LA LITURGIE LA GRANDE ENTREE ET LE CANON EUCHARISTIQUE * LA FIDELITE Voici qu'arrive le moment d'éprouver la fidélité au Christ.En quoi consiste donc cette fidélité? En ceci, qu'il faut le comprendre avec exactitude, Lui , Son oeuvre, Sa personne. Lorsqu'Il enseignait ,Il parlait aux gens simples en paraboles, mais les découvrait à ses disciples.Et voilà arrivé le temps où même Ses disciples ont cessé de le comprendre: lorsqu'Il se condamne lui-même à la souffrance,qui commence avec l'entrée à Jérusalem,Sa conduite leur devint incompréhensible.Alors qu'ils pensaient qu'Il allait maintenant se proclamer Roi, Il pleurait en regardant Jérusalem, qui aujourd'hui Le glorifie, et demain se détournera de Lui. Et voilà que nous, maintenant, fidèles disciples,nous devons comprendre qu'au moment du chant des Chérubins, lorsque nous glorifions le Christ, en tant que Roi entrant dans Jérusalem,nous L'accompagnons en même temps au Golgotha.La grande Entrée, lorsque les Dons, préparés sur la table de prothèse , sont transportés solennellement sur l'autel, est justement, en même temps que la marche du Christ vers Jérusalem, assis sur le petit d'une ânesse, Sa montée au Golgotha sous le poids de la croix.C'est pourquoi, en même temps que le peuple chante triomphalement Pour recevoir le Roi de toutes choses... , le prêtre, ayant fermé le rideau-couvercle du tombeau-,prononce: Le noble Joseph,ayant descendu du bois ton Corps immaculé..."En concordance avec celà, nous-mêmes éprouvons, au moment de l'hymne chérubique, un sentiment complexe, simultanément affligé et triomphant. Aux jours de la vie terrestre du Christ, il y eut d'abord le triomphe de l'entrée dans Jérusalem; et ensuite,la marche funèbre vers le Golgotha. Et maintenant, rendus sages, fidèles, au moment du Chérubikon, tout d'abord nous pleurons avec le Christ sur nous-mêmes, baissant la tête devant les saints Dons, et ensuite nous retrouvons la joie, nous exclamant: Pour recevoir le Roi de toutes choses,invisiblement porté par les Anges...! Grandiose est ce moment du Chérubikon-car ici se découvre le mystère du Roi-Christ. Maintenant Il ne se cache plus. Il permet sa glorification comme Roi de tous, alors qu' auparavant Il s'empressait de disparaître, lorsque la foule voulait Le proclamer Roi. Maintenant, donc, le Christ se remet avec confiance entre les mains du peuple. Et nous, les fidèles, comprenons maintenant le Christ,comme le Roi qui n'est pas de ce monde.Et nous Le soutenons,avec les Anges,porté par eux sur les boucliers de la victoire; c'est à dire que nous, les fidèles, nous élevons le Roi de tous,en même temps qu'Il est,avec nous,porté par les Anges, sur les boucliers maintenus par les lances, ainsi que , dans les temps anciens, les guerriers victorieux portaient le Roi. Les Anges sont réellement présents, où pourraient-ils en effet être ailleurs qu'auprès de leur Seigneur? Car en ce moment s'accomplit l'oeuvre unique, pour laquelle le Fils de Dieu, abandonnant le Trône de Dieu le Père, est descendu sur terre: l'oeuvre du salut du genre humain déchu. Si les anges sont les gardiens de notre vie, comment pourraient-ils ne pas participer à ce qui est leur rôle principal? Et ils accompagnent le Christ, dès le moment de Sa prédication, ainsi qu'il est dit dans l'Evangile: qu'à la fin de Sa tentation par le diable dans le désert, les Anges se sont approchés et L'ont servi. Voilà pourquoi,au moment de sa sortie avec l'Evangile, le clergé est accompagné par les Anges, ce pour quoi le prêtre prie,dans la prière secrète: Fais qu'avec notre entrée se fasse aussi celle des saints Anges qui concélèbrent avec nous, et avec nous glorifient ta bonté". Voilà pour quelle raison ce chant s'appelle "Chérubikon". Et nous, les fidèles, n'éprouvons-nous pas à partir de cette prière comme une rupture dans notre état?: un afflux de piété et l'approfondissement de la prière, avec l'abandon de tous les soucis de ce monde. Comme ainsi est profond et saisissant le mystère de notre liturgie! *LA PAIX Après le chant des Chérubins vient l'ecténie des demandes.Ensuite commence le Canon Eucharistique-partie la plus importante de la Liturgie-qui correspond à la Semaine Sainte et Pâque. Pendant le chant des Chérubins, nous, les fidèles disciples du Christ,sommes montés avec Lui au Golgotha.Mais voilà que les évènements semblent revenir en arrière. On entend ces paroles:Prenez,mangez,...Buvez en tous...-prononcées lors de la Sainte Cène.Il y a là un des plus grands mystères. Comment le Christ,présent à la Cène,pouvait-Il proposer à Ses disciples Son Corps et Son Sang-comme s'ils avaient été déjà offerts en sacrifice avant même le Golgotha. En ceci réside pour nous chaque mystère,nous ne savons pas comment cela se passe. Pour chaque mystère,nous savons seulement ce qu'il contient,mais non comment il s'accomplit. De même ici, nous connaissons le fait que le Christ s'est offert aux Apôtres en nourriture avant le Golgotha;mais comment cela a pu se faire,il ne nous est pas donné de le comprendre. Il s'est apporté en sacrifice,s'est immolé Lui-même,avant que Judas ne le livre,avant la prière à Gethsémani,avant d'être condamné à mourir sur la croix.Tu es celui qui apporte et est apporté, lit le prêtre dans la prière secrète, pendant le Chérubikon. Tu as été saisi, livré, jugé et crucifié, et ils pensaient avoir grande puissance et autorité sur Toi. Mais Tu les as humiliés, par le fait que Tu T'es condamné Toi-même, avant leur décision, Tu T'es livré avant leur trahison, Tu T'es réprouvé avant leur condamnation, et Tu es mort avant qu'on ne Te tue. Et nous, de même,maintenant, nous offrons ce sacrifice non sanglant, pensant que c'est nous qui l'offrons, alors que Tu es Toi l'unique qui T'offres et Te donnes en nourriture aux fidèles: Tu es Toi-même Celui qui offre et qui est offert,Celui qui reçoit et est donné, Christ notre Dieu, et nous Te rendons gloire,Père ,Fils et Saint Esprit, dit le prêtre,terminant la prière secrète. Quel est donc notre rôle, notre situation, devant celà. Nous T'accompagnons, ayant accepté par notre foi, ce Mystère, qui est Tien, et c'est pourquoi nous proclamons dans la joie et triomphalement notre "Credo", - "Je crois", symbole de la foi, dans lequel sont exposés tous les mystères de Ta Révélation. -Tu es sacrifié et nous acceptons Ton sacrifice et T'accompagnons, apportant de notre côté le plus sublime de ce que nous pouvons T'apporter: l'Offrande de Paix, le Sacrifice de louange. Nous aussi T'offrons un sacrifice, mais en paroles, c'est-à-dire le sacrifice de louange, le sacrifice de nos coeurs reconnaissants, purifiés par Ton Sang. En cela nous Te portons témoignage- que Tu n'es pas mort en vain - nous, qui sommes ici présents, sommes le fruit de Ton Sacrifice. Ce sacrifice, Ton sacrifice, trouve la résonnance, la réponse par le sacrifice de louange, de la louange de Ton sacrifice démesuré, de Ton exploit incroyable, de Ton Amour qui engloutit tout. Mais nous n'apportons pas cette louange par nous-mêmes (car l'âme humaine n'est pas fiable, est inconstante), mais elle apparaît comme le résultat de la "paix bienveillante", de cette Paix que Tu nous donnes, ainsi que Tu nous l'as promis au moment même où Tu disais: "prenez, mangez, buvez" - "Je vous donne Ma Paix, pas comme ce monde la donne". Et voilà que cette Paix, qui est à Toi, de Toi descendue dans nos âmes, nous donne le droit à la bienveillance de Te chanter, de T'apporter le sacrifice de louange. Oui, une si fine harmonie, un si étonnant mystère de paix se déroulent devant nous, dans la Liturgie. Qu'est donc la Paix du Christ? N'est-ce pas celle qu'ont chantée les Anges au moment de la Nativité: "Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et paix sur la terre". Presque deux milles ans se sont écoulés depuis, et la paix n'est pas dans le monde. Non, cette paix est descendue alors des cieux, et étant d'essence céleste, elle a réconcilié non pas la terre avec la terre, mais la terre avec le ciel, cette paix a réconcilié Dieu avec l'homme, elle L'a implanté profondément au coeur de l'homme, car il est dit: "Notre Christ - notre Paix"; Et seulement grâce à celà devient possible notre participation à la Liturgie. Ton sacrifice, qui n'a pas de prix, nous a réconciliés avec Dieu, a apaisé Sa juste colère, a éteint les flèches menaçantes du feu- comme pour les trois enfants qui étaient dans la fournaise. Elle nous donne la force et la hardiesse de nous tenir à la Liturgie, au milieu du feu de la gloire de Dieu, des Chérubins flamboyants, en présence de la sainteté des Saints. Non, ce n'est pas par nous-mêmes, mais c'est Ta Paix, qui produit en nous la grâce, le sacrifice de louange. Sans Ton sacrifice, il n'y aurait pas de paix, sans la paix, pas la grâce de nous rendre dignes d'offrir le sacrifice à notre tour, le sacrifice réponse de louange. Reçois donc notre chant de louange, que nous sommes prêts à Te clamer sans cesse, avec les Anges aux six ailes, avec les Chérubins annonçant sans arrêt le chant de victoire :"Chantant, criant, clamant et disant: Saint, Saint, Saint, le Seigneur Sabbaoth, le ciel et la terre sont emplis de Ta Gloire, Hosannah dans les lieux très hauts, béni soit Celui qui vient au Nom du Seigneur". Oui, la Paix du Christ apparaît comme base principale des chants liturgiques, ainsi que la Lumière du Christ- celle des Vigiles. Là, dans les moments les plus importants, la Lumière du Christ illumine les fidèles. "Lumière paisible" entend-on au début. On lit les prières avec ce thème de la lumière, on annonce: Glorifions dans les chants la Mère de Dieu, Mère de Lumière, on lit le verset de prière pour la Lumière de Vérité. On bénit Gloire à Toi, qui nous a montré la Lumière, et enfin, Christ, vraie Lumière - par quoi se terminent les Vigiles. Ici, l'Offrande de paix couvre tout le temps de la Liturgie. Elle commence avec l'ecténie pour la Paix : En paix prions le Seigneur; la paix qui vient d'En-Haut,la paix pour le monde entier, pour des temps paisibles. Quatres prières pour la paix, de même deux ecténies de demandes - pendant lesquelles l'Eglise prie cinq fois pour la paix:1Un jour parfait, saint, paisible et sans péché.2 Un Ange de paix.3 bonnes et utiles pour nos âmes et la paix pour le monde.4 Terminer le reste de notre vie dans la paix et la pénitence. et 5 Une fin chrétienne ,sans honte et paisible de notre vie. Ensuite chacune de ces petites ecténies débute par ce leit-motiv: Encore et encore en paix,prions le Seigneur! -Enfin, plusieurs fois au cours de la liturgie le prêtre transmet la paix aux fidèles avec cette bénédiction:Paix à tous! Ainsi,on peut dire que toute la Liturgie est imprégnée de paix,comme les Vigiles le sont de lumière.Les Vigiles s'accomplissent dans les ténèbres de la nuit,et supplient de recevoir la lumière et lorsque la lumière du jour illumine les âmes des croyants, ceux-ci, ayant déjà reçu la lumière du Christ, se délectent de la paix du Christ qui leur donne le droit de participer, d'être en communion et à la Sainte Cène et au Golgotha et à la Résurection avec l'Ascension-être participants à la Liturgie-ce mystère de la paix du Christ. Archimandrite Athanase, Paris Extrait de Mistika Litourguii, traduit du russe par N.M.Tihomirova. |
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