Le devoir des dirigeants et des subordonnés
Le devoir
Le devoir des dirigeants
1. [79] Premièrement, de nombreux Chrétiens veulent et recherchent les honneurs et les situations d'autorité, mais de tels gens n'obtiennent pas d'éloges, non seulement dans les livres chrétiens, mais également dans les livres païens. Quiconque recherche les honneurs n'est pas digne d'honneur. Les gens ne savent pas ce qu'ils veulent pour eux-mêmes. Il arrive souvent que, pour certains, l'honneur soit comme une épée dans les mains d'un fou avec laquelle il se tue lui-même et tue d'autres gens. Un arbre élevé est soumis à tout vent, et quand il tombe, il écrase beaucoup de petits arbres se trouvant près de lui. De même un dirigeant est sujet à de nombreuses épreuves, et sa chute s'entend de loin et est une occasion de scandale. Un dirigeant commet des péchés, et tout le monde en est au courant. Aussi, bien-aimé, ne recherche pas les honneurs ou les situations d'autorité, mais attends d'être appelé.
2. Deuxièmement, quand tu es appelé aux honneurs et aux situations d'autorité, tiens compte de ta force. Un homme ne peut pas soulever toutes les charges, et n'importe qui ne peut être en situation d'honneur et d'autorité. Quiconque souhaite diriger et gouverner les autres doit apprendre auparavant à se diriger et à se gouverner lui-même, et il doit d'abord faire lui-même ce qu'il veut que les autres fassent et ce qu'il leur ordonne de faire.
La raison et une conscience pure sont absolument nécessaires à un dirigeant chrétien. Un dirigeant sans raison sera perdu, comme un aveugle; et sans une conscience pure il déchirera la société au lieu de l'édifier.
En outre, une position honorifique change le caractère d'un homme, mais rarement dans le bon sens. Sans les honneurs, il y aurait beaucoup de saints.
Considère ces choses, chrétien, et ne te charge pas d'un fardeau au-delà de tes forces. Et quand vient l'appel de Dieu, alors, même si tu fuis les honneurs, tu n'y échapperas pas.
3. Troisièmement, il y a un serment pour ceux qui parviennent aux honneurs et aux situations d'autorité. Le sens du serment est de faire de son mieux pour le bénéfice de la société, d'agir selon sa conscience, de rechercher la vérité, d'extirper l'injustice, et de respecter et cultiver la justice; en un mot, de pourvoir au bien commun avec zèle.
Beaucoup de chrétiens, quand ils reçoivent un honneur, font le serment juste pour la cérémonie, ou bien oublient leur serment dès qu'ils ont franchi le seuil de l'église après l'avoir fait. De tels gens reçoivent un honneur pour leur propre bénéfice, et non pour le bien commun, et bien qu'ils soient chrétiens extérieurement, ils sont néanmoins athées intérieurement.
N'imite pas de tels dirigeants, de peur que tu ne souffres avec eux au juste Jugement du Christ, car les hommes puissants seront puissamment tourmentés (Sagesse 6 : 6). Ils recevront d'autant plus de tourments qu'ils auront été plus acharnés et auront commis l'injustice ici. Leurs péchés et leurs iniquités crient au Ciel et réclament vengeance. Bien-aimé, garde-toi de suivre de tels dirigeants, mais quand tu as une situation honorifique, souviens-toi de ton serment et agis en conformité avec la conscience chrétienne et avec le sens de ce serment, souviens-toi du Jugement Redoutable du Christ, car tu devras y rendre compte de tout face au juste Juge. Sois envers tes subordonnés comme un père envers ses enfants, et soucie-toi d'eux comme un père de ses enfants.
4. Quatrièmement, étant donné que, parmi les Chrétiens, il y en a beaucoup qui sont perfides et hypocrites, ne crois pas promptement les dénonciateurs, mais écoute le dénonciateur d'une oreille et accorde l'autre à l'accusé. Ne sois pas prompt à faire confiance sur ce point.
5. Cinquièmement, recherche la vérité par tous les moyens, mais quand ce n'est pas possible de la trouver, qu'il en soit ainsi, et remets-toi s'en au jugement de Dieu; là, chaque vérité et chaque mensonge deviendra manifeste. Car il vaut mieux laisser le coupable partir sans punition que de punir l'innocent.
6. Sixièmement, en matière de jugement, ne tiens pas compte des personnes, ni des amis ou des ennemis, des connaissances ou des inconnus, mais que tes servantes soient la vérité et la justice, car tu fais l'œuvre de Dieu, quand tu es assis sur le siège du juge. Considère alors l'affaire, et non les personnes; et rends à chacun son dû.
7. Quand il est nécessaire de punir quelqu'un en paroles ou en actes, aie recours à la punition à contrecœur. Quand tu punis par des paroles, sois attentif à ne pas punir avec des mots de reproches, "tu es un tricheur", "tu es dépensier", "tu es un voleur", etc... Ce sont des insultes, pas des punitions. Quand tu punis en actes, punis mais ne martyrise pas. Beaucoup de dirigeants font subir leur colère et leur courroux à leurs subordonnés, et déchirent la chair humaine comme une bête, et de la sorte ils ne les punissent pas mais les martyrisent. Punis ton subordonné avec commisération et pour sa correction, car c'est le propre du cœur et de l'esprit chrétien de souffrir pour son voisin. Souviens-toi que celui qui est puni est ton frère et a la même chair et les mêmes faiblesses que toi.
8. Quand tu ressens de la colère dans ton cœur contre un subordonné, retiens-toi de le punir, en paroles ou en actes, en étant en colère, mais attends que ta colère soit apaisée, parce que, en tant que chrétien, tu ne dois pas punir en étant en colère. Tu ferais beaucoup de choses inconvenantes et indignes d'un chrétien, et, bien que tu puisses le regretter par la suite, tu ne pourras toutefois plus revenir sur ce qui aura été dit ou fait. Car la colère écrase tout comme une tempête, et consume tout comme un feu. Un homme en colère ne peut rien faire de bon, seulement du mal. Alors garde-toi de punir quand tu es en colère.
9. Neuvièmement, souviens-toi que tu es un chrétien, et que tu as autorité sur des chrétiens. Les Chrétiens sont des frères les uns envers les autres. Le Seigneur Jésus-Christ n'avait pas honte d'appeler les Chrétiens frères, comme nous le voyons dans les Ecritures; combien plus un homme ordinaire, même un dirigeant, doit tenir les Chrétiens pour des frères et les appeller ainsi.
Garde-toi donc de mépriser tes subordonnés et de les tenir pour des marchepieds, comme c'est l'habitude chez certains. Sache vraiment qu'il y a des saints et des élus de Dieu parmi eux, et que c'est une chose grave de les mépriser et de les considérer comme nuls, comme tu peux le voir pour toi-même. Et, bien que tu sois obligé de montrer ton rang et ton autorité extérieurement, considère néanmoins, en dedans de toi, que tu n'es en aucune façon meilleur qu'eux. De plus, Dieu est capable de faire d'un subordonné un dirigeant, et d'un dirigeant un subordonné. Pense à ces choses, et tu ne seras pas arrogant envers tes subordonnés.
10. Dixièmement, il n'y a pas de bonne œuvre ou de réussite sans l'aide de Dieu. Pour cette raison, prie avec ferveur le Seigneur de t'aider dans ton métier et tes actes.
1. [80] Premièrement, chaque dirigeant est désigné par Dieu. Selon les Ecritures, il n'y a point de pouvoir qui ne vienne de Dieu: les pouvoirs qui existent sont décrétés par Dieu (Rom. 13:1). Pour cette raison, révère chaque dirigeant pour l'amour de Dieu, et honore-le en tout comme il convient.
2. Deuxièmement, puisqu'un dirigeant subvient aux besoins de la société dont tu fais partie, aime-le donc comme ton père et bienfaiteur, et sois reconnaissant envers lui.
3. Troisièmement, accomplis tout ce qu'il ordonne et décrète pour le bien commun, et agis en accord avec son décret.
4. Quatrièmement, garde-toi de croire les calomnies et les mauvaises rumeurs contre ton dirigeant, car la rumeur fallacieuse se répand souvent contre tout homme, et plus particulièrement contre un dirigeant. Par-dessus tout, garde-toi de le calomnier et de le condamner, car tu commettras un péché grave. C'est une grande iniquité de calomnier et condamner un homme simple, et plus encore un dirigeant. Le respect dû au dirigeant lui est retiré par de telles calomnies, et il s'ensuit le dédain et la désobéissance envers lui parmi ses subordonnés, ainsi que tous les maux dans la société.
5. Cinquièmement, quand un dirigeant te punit en paroles ou en actes, supporte-le sans te plaindre. Quand tu es puni à juste titre, alors tu le mérites, et tu reçois un châtiment mérité. Pourquoi donc murmures-tu? Quand c'est injuste, supporte-le quand-même, et attribue-le aux péchés que tu as commis devant Dieu.
6. Sixièmement, parce que le dirigeant s'occupe de la société, et par conséquent de toi aussi, il a donc besoin de bon sens et de soutien dans les épreuves. Aussi, toi, de même que tous ses subordonnés, vous devriez prier pour que Dieu l'éclaire, l'aide et le soutienne. A ce sujet, l'Apôtre dit: j'exhorte donc, avant tout, de faire des demandes, des prières, des intercessions et des actions de grâces pour tous les hommes; pour les rois et tous ceux qui sont au pouvoir, afin que nous menions une vie calme et paisible en toute piété et dignité (I Tim. 2:1-2). Le bonheur ou le malheur de la société, comme la santé de tout le corps, dépend du dirigeant. Aussi tous doivent prier pour que le dirigeant soit honnête et bon, et que la société puisse ainsi prospérer. Qui plus est, retiens-toi par tous les moyens de défier le dirigeant, sans quoi le jugement de Dieu s'abattra sur toi à l'instant, comme il l'a fait sur Dathan et Abiron et le reste de leurs partisans. St Tikhon de Zadonsk, Evêque de Voronej et Elets
Counsels on the Particular Duties of Every Christian, IV, 1
traduit de l’anglais par Philippe Morin
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