La voix du Ciel

 

La voix du Ciel


L’Eglise orthodoxe est placée sous la conduite du Christ, qui est sa Tête, et est dirigée par Lui. Cette conduite est réelle, perceptible, visible, si ce n’est du monde entier, du moins des membres de l’Eglise eux-mêmes. En outre, cette direction par la Providence divine peut être observée par les hommes en ce qu’elle déroge en partie aux lois de la nature, rompt l’enchaînement des causalités et nous place devant le fait du miracle.

 Le miracle existe depuis que l’Eglise existe. Toute son histoire, depuis le Christ et les apôtres - et même depuis les prophètes - jusqu’à ce jour est une suite ininterrompue de miracles. Là où il n’y a pas de miracles, là où ils sont rares ou ne sont pas moralement significatifs, il est permis de poser la question : l’Eglise même est-elle présente ?

 Le miracle est la voix du Ciel. Si nous n’entendons pas le Ciel, c’est qu’incontestablement notre ouïe est dérangée et le chemin que nous suivons est faux. Les manifestations surnaturelles peuvent être diverses, mais on en distingue essentiellement de deux types : celles qui proviennent de Dieu et les prodiges sataniques. En effet, l’expérience spirituelle de l’Eglise, exposée dans les instructions des saints Pères et dans l’histoire ecclésiastique, permet de distinguer deux sortes de faits “miraculeux” et d’en définir l’origine précise. Celui qui se confesse chrétien orthodoxe se doit d’être à même d’opérer cette distinction en utilisant les méthodes patristiques appropriées. Afin de distinguer les subtiles imitations démoniaques des prodiges véritables de Dieu, il est indispensable de posséder le don de discernement spirituel, de même qu’une élévation spirituelle acquise par une ascèse personnelle et accordée par le Seigneur.

 On sait que les miracles ont un but moral tout à fait évident. Jamais ils ne cherchent à ébranler l’imagination. Ils ne s’adressent pas, en règle générale, aux masses incrédules, ce qui a pour effet que ce monde, qui gît dans le mal, ne les remarque même pas. Ces indices spirituels essentiels permettent de distinguer les miracles divins des prodiges opérés par les démons, prodiges toujours plus nombreux à mesure que l’on s’approche de la fin du monde, ainsi que cela a été prédit par une multitude de pères saints de l’Eglise.

 Celui qui lit attentivement la littérature orthodoxe n’a pas manqué de remarquer une certaine typologie des miracles orthodoxes, c’est-à-dire des formes extérieures communes de la révélation du miracle divin. Ainsi, les guérisons opérées par des reliques ou consécutives à la célébration d’un office d’intercession, l’écoulement de myrrhon des icônes, la rénovation miraculeuse des icônes, le ravissement d’un être humain hors du monde terrestre puis son retour sur terre pour témoigner des pérégrinations de l’âme après la mort. L’Eglise antique connaissait encore l’ouverture spontanée des portes scellées d’un temple et autres faits semblables. On peut également citer des apparitions célestes, les cas où des personnes sont averties mystérieusement des dangers qui les menacent et peuvent ainsi y réchapper. L’histoire de l’Eglise déborde de tels exemples et jamais, en aucune époque, les vrais miracles n’ont fait défaut à l’Eglise véritable et il en est encore ainsi de nos jours.

 Pour ce qui est des prodiges sataniques, une constante typologique peut également être remarquée. De tout temps ont existé des phénomènes tels que l’apparition d’objets célestes, la lévitation, la télépathie et autres. Le XX° siècle n’a pas apporté de phénomènes foncièrement nouveaux dans ce domaine, mais il faut toutefois noter une intensification considérable de l’activité démoniaque.

 Aujourd’hui, le changement fondamental par rapport aux siècles qui nous ont précédés, réside dans la prévalence du rationalisme au sein de la conscience collective. L’homme contemporain est devenu incapable de comprendre le miracle. Il peut le constater, le reconnaître comme tel, s’en étonner, mais hélas il est rarement à même d’en tirer des enseignements moraux, de se mettre à son écoute et d’obéir à la voix céleste. Une orientation aussi rationaliste de l’âme ouvre la voie à une large prolifération de prodiges sataniques, qui se différencient des miracles de Dieu en ce qu’ils favorisent nos passions et ne posent pas de problèmes moraux. Il n’est pas même nécessaire de prêter attention aux prodiges de l’ennemi, car ils frappent d’eux-mêmes l’imagination et la sensibilité rudimentaire de nos contemporains, en flattant les aspects les plus bas de l’âme humaine. Alors que le miracle divin, ainsi que la Parole de Dieu, exigent de l’homme d’être à l’écoute, et partant, de se disposer à l’obéissance.

 Parmi les miracles contemporains apparus au sein de l’Orthodoxie, les plus manifestes et les plus éloquents sont ceux de l’icône myrrhoblite de la Mère de Dieu de Montréal et l’invention des reliques incorrompues de saint Jean de Shangaï. Qui plus est, dans l’un et l’autre cas il ne s'agit pas d’un miracle unique, mais d’une longue série de miracles, qui ne laissent pas la moindre hésitation quant à leur origine divine.

 Les circonstances dans lesquelles José Muñoz est entré en possession de l’icône sont largement connues et sont en elles-mêmes déjà miraculeuses. Le registre où sont consignés les miracles de l’icône s’enrichit sans cesse de nouveaux cas. L’épanchement de myrrhon dure depuis déjà 12 ans et il est permis de dire que pratiquement tous ceux qui le désirent, quel que soit l’endroit au monde où ils habitent, ont la possibilité de sentir ce myrrhon miraculeux et d’y recourir, avec foi et dans la prière.

 Incontestablement, il n’est rien d’égal ou de comparable à ce miracle-ci. Particulièrement, si l’on tient compte du fait que cette icône-là a été peinte il y a seulement 13 ans et qu’elle n’a commencé à faire écouler le myrrhon que lorsqu’elle fut au sein de l’Eglise russe hors-frontières. Ce fait mérite une attention toute spéciale. Certes, des cas similaires d’écoulement de myrrhon ont pu être également observés au sein des Eglises orthodoxes “officielles”, mais ces phénomènes apparaissaient sur des icônes ou des objets sacrés anciens (comme, par exemple, les têtes myrrhoblites des saints moines de la Laure des Grottes de Kiev), ou alors ils présentent un caractère épisodique, unique.

  Il en va tout autrement dans le cas de l’icône d’Iviron de Montréal. La permanence du miracle, sa profusion, le lieu, l’époque et les circonstances donnent à ceux qui le voient une indication tout à fait claire sur la droiture de la voie suivie par l’Eglise hors-frontières au milieu des manœuvres astucieuses et savantes des diverses juridictions. En toute logique, ce miracle devrait réveiller la pensée et la conscience chrétiennes, les amener à réfléchir sur l’histoire de l’Eglise russe hors-frontières et sur sa mission dans le monde contemporain. Le chrétien orthodoxe qui ne connaîtrait pas l’Eglise hors-frontières, mais qui entendrait soudain parler de l’icône myrrhoblite, devrait en toute logique fixer son attention sur ce point, tenter de comprendre la nature réelle de la séparation entre l’Eglise hors-frontières et les apostasies de diverses mouvances au sein de l’Orthodoxie.

 Un autre miracle contemporain devant interpeller la pensée religieuse, est la glorification du saint pontife Jean de Shangaï. Tout d’abord, un saint contemporain n’est déjà pas chose courante. De plus, la profusion de miracles opérés du vivant même du saint évêque par ses prières, ou provenant de son tombeau, ou postérieurs à l’invention de ses saintes reliques sont un phénomène sans précédent à l’époque actuelle, qui autorise en toute objectivité à établir une comparaison avec les saints mégalomartyrs Georges et Panteleïmon, ou le saint thaumaturge Nicolas. Et enfin, une attention toute particulière doit être portée sur le fait que le saint nouvellement glorifié est justement un hiérarque, un évêque, un de ceux dont il est dit qu’ils sont “les yeux de l’Eglise et les luminaires de son Corps”.

 Du point de vue de l’approche ecclésiologique des problèmes de l’Eglise, il n’est pas indifférent de remarquer le type de sainteté qui se manifeste en son sein. Les martyrs pour le Christ peuvent exister même parmi les non-baptisés, qui formellement ne sont pas membres de l’Eglise, laquelle les reconnaît baptisés par leur propre sang. Les saints moines, qui ont abandonné le monde, peuvent atteindre la sainteté indépendamment des erreurs ecclésiologiques pouvant apparaître au sein de leur Eglise locale. Les bienheureux “fols en Christ” sont tout spécialement glorifiés par le Seigneur, en particulier, pour avoir fustigé les mensonges et la décadence morale des membres de leur Eglise. De tels saints peuvent également apparaître au sein du Patriarcat de Moscou et dans les autres Eglises “officielles”, tout au moins aux premiers temps de leur  abandon de la Vérité. Mais un hiérarque, un saint évêque d’une Eglise locale ou d’une juridiction qui se serait écartée de la Vérité du Christ, ne peut apparaître en tant que tel. En effet, le hiérarque en tant que guide spirituel personnalise en quelque sorte la direction spirituelle de son Eglise et exprime, si l’on peut dire, sa doctrine ecclésiologique. Le saint archevêque Jean, qui a exprimé clairement la doctrine de l’Eglise russe hors-frontières quant à l’apostasie du monde en général et du Patriarcat de Moscou en particulier, ne fait pas exception à cette règle. Il a effectivement, par la parole, par l’action, et par son exemple, indiqué le chemin du salut non seulement à certains clercs et fidèles, mais à l’Eglise dans sa totalité. Il lui a été donné de mettre en place une parcelle de l’Eglise avec l’évêque à sa tête, dispensant la plénitude des saints Mystères, manifestant un modèle de vie orthodoxe dans le monde contemporain.

 Le miracle de l’invention des reliques incorrompues du saint archevêque Jean doit profondément parler à tout cœur orthodoxe, doit amener à réfléchir nombre de ceux qui sont en quête de Vérité. Ce n’est pas un hasard, si la glorification de Monseigneur Jean s’est accomplie de nos jours, alors que notre Eglise s’est trouvée à la croisée des chemins, placée face à la redoutable tentation - et séduction - d’emprunter les voies larges de l’Orthodoxie “officielle” qui, en Russie, a retrouvé force, liberté, pouvoir et qui a canonisé les fautes et les chutes antérieures, auxquelles se sont ajoutées de nouvelles fautes commises en toute conscience par elle-même, sans qu’aucune ingérence ou pression extérieure ne puisse être invoquée. Les miracles provenant du tombeau du hiérarque d’éternelle mémoire se manifestent depuis longtemps déjà, mais sa glorification s’est placée précisément à notre époque si décisive dans l’histoire de l’Eglise russe hors-frontières. Il n’est pas possible de ne pas y voir l’action de la Providence divine, qui veut nous faire entendre raison et espère notre salut.
 
 Hélas! Hélas! Des signes aussi grandioses et merveilleux se produisent sous nos yeux, mais … avons-nous la foi, obéissons-nous à cette voix de Dieu qui nous adresse des paroles évidentes pour tout cœur sans malice. Pour se déterminer sans risque d’erreur dans le monde orthodoxe contemporain si complexe, il convient avant tout de bien comprendre l’histoire de l’Eglise, de maîtriser les problèmes canoniques essentiels, de saisir l’essence de l’hérésie de l’œcuménisme et de son activité dans le monde actuel. Il est indispensable également de connaître la dogmatique, l’hagiographie. Mais il ne faut pas ignorer que nos contradicteurs connaissent tout autant que nous toute cette science ecclésiale et savent en tirer des arguments à leur profit. Cependant, le différend séparant l’Eglise orthodoxe russe hors-frontières et le Patriarcat de Moscou ne se résout pas par des joutes théologiques, mais dans la vie. L’application concrète des connaissances théologiques doit s’exprimer en action. Et cette action n’est autre que l’obéissance au Seigneur. Interroge le Seigneur, interroge-Le sans la présomption altière des Latins ou des membres de différentes sectes, sans l’audace d’un pharisien exigeant que Dieu lui envoie des signes. Interroge-Le, ayant regardé le monde les yeux grands-ouverts et l’oreille à l’écoute de tout ce que Dieu a déjà dit et tout ce dont Il a déjà témoigné. Interroge-Le de la voix de l’aveugle ayant recouvré la vue : Qui es-Tu, Seigneur, afin que je croie en Toi, où m’ordonnes-Tu d’aller pour Te suivre ?  A une question ainsi posée, la réponse est déjà prête.

 Il en va tout autrement, lorsque l’homme ne pense même pas à poser de question.  Il est terrifiant de penser à tous ceux qui ont entendu cet appel évident du Ciel et n’y ont pas répondu. S’il n’est déjà pas bien de refuser de suivre l’exemple des saints, si c’est pécher que de fouler les canons, s’il est dangereux de chercher à saper les dogmes, combien est-il plus terrible de transgresser les indications manifestes de Dieu ! L’auteur de ces lignes connaissait un prêtre du Patriarcat de Moscou qui conservait chez lui de ce myrrhon miraculeux provenant de l’icône Portaïtissa de Montréal, ce qui ne l’empêchait pas de combattre “le schisme karlovtsien” usant de toutes les vérités et contre-vérités… Certes, il s’agit là d’un cas limite, effrayant, et on pourrait dire monstrueux, toutefois, personne n’est préservé d’une pareille désobéissance conduisant à terme dans le gouffre de la rébellion contre Dieu.

 Ah! vous qui mettez le zèle de l’obéissance au-dessus de tout !… Souvenez-vous qu’il nous faut, selon la parole de l’apôtre, faire allégeance à Dieu plutôt qu’aux hommes qui Le contredisent, même lorsqu’ils sont revêtus de mitres et d’habits épiscopaux.

 Ah! vous les adeptes de l’humilité et du refus de juger !… Un choix se pose à chacun de nous : soit, par notre action et notre prière, nous condamnons la majorité orthodoxe contemporaine, patriarches, évêques, prêtres et fidèles, soit nous serons amenés avec eux tous à condamner toute l’Eglise ancienne, l’Eglise des premiers-nés et de tous ceux dont les noms sont déjà inscrits dans les Cieux et qui enseignaient et vivaient tout à fait différemment de ce qu’enseignent et vivent nos contemporains qui sont dans l’égarement.

 Le choix est devant chacun de nous. Le témoignage de Dieu, le témoignage du Ciel nous suggèrent déjà la décision juste.

Père Timothée Selsky
 N° 8 - Septembre 1994

Traduit du russe par N.M. Tikhomirova
 

Brève notice concernant l’auteur :

 Après la signature par le métropolite Serge en 1927 de la tristement célèbre Déclaration de loyauté à l’égard du pouvoir soviétique, une frange très importante de l’Eglise en Russie cessa, en signe de désaccord et de rupture, la commémoration du métropolite Serge. Ces évêques et prêtres-confesseurs entrèrent dans l’histoire sous le nom de niépominaïouchtchié , c’est-à-dire “les non-commémorants”, qui ne tardèrent pas à former le gros des Saints Nouveaux-Martyrs et Confesseurs de Russie.
Une résurgence de ce phénomène des niépominaïouchtchié est apparue ces dernières années en Russie à la suite du refus persistant du patriarche Alexis II et des autres hiérarques dirigeants, de faire pénitence pour leur compromission avec le KGB et leur servilité à l’égard de l’Etat athée. La rupture avec le patriarche Alexis a été aggravée par des ouvertures en direction du judaïsme et une persistance dans l’œcuménisme. Le père Timothée, qui a été un des inspirateurs de ce phénomène, ne s’est pas contenté de cesser la commémo-ration et est passé sous l’obédience de l’Eglise russe hors-frontières. On peut penser  que c’est à tous ceux qui sont ébranlés par l’attitude de la hiérarchie du patriarcat, mais qui ne se décident pas à franchir le pas, que le père Timothée s’adresse dans la fin de son article
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N. d. l. R.

 



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