DECRET N° 915 / 93 / 3

 



DECRET N° 915 / 93 / 3

A tout le clergé du diocèse
Saint Apôtre Thaddée 21 août/3 septembre 1993

Nous portons à la connaissance de l'ensemble du clergé et des ouailles de notre Archidiocèse, que deux nouveaux Evêques vicaires vont être consacrés pour Nous venir en aide dans la direction de l'Archidiocèse.

La consécration épiscopale de l'Archiprêtre Igor Doulgoff, qui reçoit dans le monachisme le nom de Séraphime en l'honneur et en la mémoire du Saint Nouveau-Confesseur père Séraphime / Zagorovsky /, sera célébrée en Notre cathédrale à Genève le dimanche 6/19 septembre. Il portera le titre d'Evêque de Lesna avec résidence dans l'enceinte du monastère et chancellerie dans le monastère même.

La consécration épiscopale de l'Archiprêtre Pierre Cantacuzène, qui reçoit dans le monachisme le nom d'Ambroise en l'honneur et en la mémoire de Saint Ambroise de Milan, sera célébrée le dimanche 13/26 septembre en Notre cathédrale à Genève. Il portera le titre d'Evêque de Vevey, sa résidence restera à Vevey et sa chancellerie à Genève.

En Nous réjouissant de ces deux élections et consécrations, Nous demandons à tout notre clergé ainsi qu'à toutes Nos ouailles de leur témoigner l'amour et l'obéissance qu'ils Nous ont toujours témoignés et ce jusqu'à ce jour. Nous appelons nos fidèles bien-aimés à prier pour les deux nouveaux Evêques. Que Dieu leur vienne, ainsi qu'à vous, en aide !

Archevêque Antony
de Genève et de l'Europe Occidentale


Allocution prononcée par

Mgr Séraphime, évêque de Lesna,

lors de son sacre épiscopal.

Eminentissime Seigneur, Monseigneur le Métropolite Vitaly !
Eminence, Monseigneur l'Archevêque Antony !
Eminence, Monseigneur l'Archevêque Mark !
Eminence, Monseigneur l'Evêque Varnava !

Dans la Bible nous pouvons lire l'épisode suivant : Gédéon, le fils de Joas, de la tribu de Manassé, battait du froment au pressoir. Il désirait s'en aller au loin, se cacher dans les montagnes, dans des grottes. En effet, les temps étaient instables, les ennemis et les dangers guettaient de toutes parts. C'est pourquoi il se préparait du froment pour la route. Mais un Ange lui apparut et l'appela à servir son peuple. Il cessa donc de battre son blé et s'en alla servir. Plus tard Gédéon devint un des Juges d'Israël.
Je me trouve dans une situation quelque peu semblable. Comme Gédéon, j'aspirais à une vie calme. Comme Gédéon, je fus soudain appelé à un nouveau ministère. Mais si vous, Hiérarques de Dieu, vous êtes d'authentiques Anges de l'Eglise comme il ressort du livre de l'Apocalypse, en revanche, je ne suis malheureusement pas Gédéon!
Le prophète Elie trouva Elisée qui labourait sa terre avec douze paires de bœufs. Elie s'approcha et couvrit Elisée de son manteau. C'était là le symbole de sa consécration en tant que prophète.
De même vous, Hiérarques de Dieu, pareillement à Elie, vous avez jeté votre manteau sur moi, je veux dire que vous avez imposé vos mains sur moi.
Vous pouvez être semblables à Elie.
En revanche, je ne suis malheureusement pas Elisée!
Toujours dans l'Ancien Testament, on dit de Saül avec ironie : "Saül est-il aussi parmi les prophètes"! De même certains penseront de moi : "Est-il possible qu'il soit aussi parmi les évêques"!
Mais je ne suis, malheureusement, pas même Saül!
Et néanmoins, je me tiens devant vous en cette heure si redoutable pour moi. Dans cette même cathédrale, il y a plus de trente années, saisi d'une sainte frayeur, je fus pour la première fois introduit dans le sanctuaire à travers les Portes Royales lors de mon ordination diaconale. Mais que dire de ce qui m'attend aujourd'hui!
Je revois toute ma vie en pensée. Lorsqu'on commence à se remémorer le passé, de nouveaux souvenirs apparaissent et l'on ressent le besoin de dresser une sorte de bilan. Je trouve que le Seigneur a été, et à maintes reprises, exceptionnellement généreux envers moi. Les joies furent plus nombreuses que les chagrins.
Tout d'abord, j'aurais pu devenir un jeune komsomol ou un quelconque activiste soviétique. J'étais alors âgé de moins de cinq ans et vivais dans l'autre capitale de la Russie. Je me souviens d'avoir un jour reçu un insigne de pompier. Comme tout enfant de cet âge je me mis à le porter avec fierté. Que pouvait-il bien être gravé sur cet insigne? Sinon une étoile rouge, du moins une faucille et un marteau! Et j'aurais pu ainsi vivre ma vie entière avec ces symboles …
Mais grâce à mes parents je me suis retrouvé à l'étranger. Au début, comme ce fut le cas pour tous les émigrés, la vie fut très difficile. Vraiment, très difficile. Peu de temps après notre émigration, je fus orphelin de père; et pour ma mère, l'existence devint encore plus difficile.
C'est avec bonheur que je me souviens des années passées à l'Ecole russe, dans une ambiance russe, nationale. Mes années passées au Corps des Cadets. C'est là que, pour la première fois, je me suis approché, consciemment, de l'Eglise. D'abord, en servant dans le sanctuaire, puis je devins lecteur sur le kliros.
Je me souviens avec gratitude de mes différents professeurs, directeurs, des éducateurs; je me souviens tout particulièrement de notre aumonier, le hiéromoine puis archimandrite Zossime. Je n'oublie pas mes camarades. En un mot, - tous ceux qui avaient pour charge “de veiller sur notre jeunesse”.
Lorsque je devins adolescent, le père Zossime m'offrit une croix pectorale de prêtre en argent, que j'ai gardée toute ma vie durant et que je porte depuis mon ordination.
Les étapes suivantes de ma vie : l'école, après le baccalauréat des études techniques, la guerre. Après la guerre, plus de quatre années de théologie à Paris.
Bien que nous ne fussions pas "sur le même navire", l'esprit de justice m'amène à me souvenir aujourd'hui des précepteurs et des professeurs que j'y ai eus. Eux aussi ont eu pour charge “de veiller sur notre jeunesse”. C'était l'époque où, à la tête de l'Institut de théologie, il y avait trois piliers, "Les Trois K", c'est-à-dire trois savants théologiens de renom, dont les noms commençaient tous par la lettre "K".
Tous sans exception se comportaient à mon égard avec amour et sympathie. Dès le début, je m'étais fermement décidé à leur répondre par une attitude empreinte de la plus grande correction, avec loyauté, respect et gratitude. Je revois également mes condisciples, étudiants de l'Académie.
Ensuite vint une période professionnelle civile et seulement après la prêtrise.

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Venons en maintenant à des réalités plus actuelles.
Récemment j'ai eu l'occasion de voir un film-vidéo qui fut projeté sur tout le territoire de l'ancienne URSS. Ce film s'appelait "La Russie que nous avons perdue" . Le titre parle de lui-même. Ce film fut réalisé avec le concours de Soljénitsyne, c'est dire que chaque parole a été pesée… Je voudrais relever une réflexion entendue vers la fin du film :
"Lénine aura réussi à nettoyer pour longtemps la Russie de toute personne intelligente, instruite, pensante. Il n'a pas seulement réalisé une révolution politique, il a également réalisé une révolution dans l'âme du peuple. Un nouveau type anthropologique a vu le jour en Russie, une nouvelle expression des visages est apparue chez les Soviétiques. Ainsi commença la dégénérescence de la nation…"
Pourquoi ai-je mentionné cette réflexion?
Un des grands événements de ma vie - et pas seulement de la mienne - aura été la rencontre avec le peuple russe durant la dernière guerre mondiale. A cette époque, le peuple russe n'avait pas encore eu le temps de subir en totalité ce qui est affirmé dans ce film.
Cette rencontre s'est opérée il y a cinquante ans. Et dans chaque personne rencontrée je voyais un Russe en tout point semblable à nous. Je voudrais insister là-dessus : entre eux et nous il n'y avait alors aucune différence. Cela également je ne peux l'oublier. C'était, peut-être, l'une des périodes les plus heureuses de ma vie, car c'était une époque où nous étions pleins d'espoir…
En plus de trente années de prêtrise je revois tous mes confrères prêtres dont beaucoup sont aujourd'hui disparus - que Dieu ait leur âme -, je revois mes fidèles paroissiens pour lesquels j'ai souvent manqué d'égard. Je revois tout particulièrement les Evêques. En tout premier lieu Monseigneur l'Archevêque Antony, sous l'omophore duquel se sont déroulées toutes mes années de sacerdoce. Sous son omophore on se sent toujours assuré, calme, solide, dirigé avec sagesse et combien de chaleur. C'était toujours ainsi. Cela le reste aujourd'hui.
Je me souviens également d'autres Evêques auprès desquels j'ai pu servir avant mon ordination : le Métropolite Séraphim à Paris, l'Evêque Nathanaël, l'Evêque Léonty, plus tard l'Archevêque Jean. Avec d'autres Evêques je n'ai été en contact que de façon épisodique ou en relation épistolaire.
Je voudrais aborder un autre problème.
Vous venez de m'interroger sur ma foi, vous vouliez savoir si elle était bien orthodoxe, comment je confessais la Sainte Trinité. Ces questions sont tellement importantes que vous avez, comme il convient lors d'un sacre épiscopal, exigé de moi une confession toujours plus ample et plus détaillée.
Mais je pense qu'il ne peut y avoir de doutes à ce sujet. Bien sûr que ma foi est identique à celle de tous ceux qui se tiennent autour du saint Autel et qu'elle est pleinement orthodoxe.
Mais peut-être convient-il de mettre en évidence et de souligner clairement un autre problème dans la période maligne que nous vivons. Et ceci est sans doute particulièrement important pour un futur Evêque. Quelle est notre attitude à l'égard de la hiérarchie en Russie, de son Eglise officielle comme sur d'autres problèmes d'actualité.
Afin de répondre de façon aussi claire et concise que possible j'aurai recours à la comparaison suivante.
Dès la fondation de l'Eglise du Christ, les Apôtres et autres écrivains ecclésiastiques déployèrent de grands efforts pour convaincre les Juifs que le Messie qu'ils attendaient, le Sauveur, était bel et bien le Christ. Des efforts gigantesques furent déployés pour les convaincre de ce que l'époque vétérotestamentaire était révolue et que l'on entrait dans l'ère néotestamentaire.
L'Evangéliste Matthieu consacra à cette tâche l'essentiel de son Evangile. L'Apôtre Paul poursuivit le même but avec l'épître aux Hébreux. De même firent d'autres apologistes. Le Martyr Justin écrivit son "Entretien avec Triphon le Juif" . De même Tertullien, et tant, tant d'autres.
Ainsi, depuis les temps les plus reculés, nous sont parvenus de nombreux volumes, des œuvres et des écrits divers. Tout ceci revêt la plus grande importance, sans parler du fait que l'Evangile de saint Matthieu ou les épîtres de saint Paul sont absolument nécessaires pour notre foi en général. Mais si quelqu'un d'entre nous entre en conversation avec un Juif sur des problèmes de foi, d'Ancien et de Nouveau Testaments, cherchera-t-il à étayer ses arguments à l'aide de ces ouvrages, ira-t-il puiser dans cette richesse scripturaire?
Bien évidemment, non. Car aujourd'hui, vingt siècles plus tard, nous disposons d'un argument extrêmement simple, que tout Juif est à même de comprendre. Durant toute l'histoire du peuple juif, durant tout l'Ancien Testament, le Seigneur a régulièrement envoyé des prophètes, grands ou petits, sans que jamais il n'y ait d'interruption. Il en fut ainsi jusqu'à la venue du Christ où un terme fut mis au ministère des différents prophètes. L'Ancien Testament s'achevait, le Nouveau s'ouvrait. Et depuis vingt siècles, du sein du peuple juif n'est plus apparu aucun prophète, grand ou petit. Car ce qui était espéré est devenu réalité.
Nous pouvons proposer une argumentation du même type, tout aussi claire et accessible, à tout fervent fidèle du Patriarcat de Moscou.
Durant toute l'histoire de la Russie, notre Eglise fut toujours son fondement, son espérance et le guide du peuple russe. Elle en fut le gouvernail, l'éducateur attentionné, le critère de vérité, la conscience. Que ce soit lors des guerres intestines féodales dans la Russie ancienne, à l'époque du joug tatar, tout spécialement lors du Temps des troubles, de l'avènement des bolchéviques, durant les persécutions, le martyre.
Il en fut de même avec notre Eglise en dehors des frontières de la Russie. Chacun sait le rôle qu'elle a joué dans l'émigration, que ce soit dans les centres importants ou dans la province et les lieux les plus reculés. Notre Eglise s'est tout spécialement manifestée durant la dernière guerre. Ayant tout perdu devant l'offensive de l'Armée rouge, ayant été dépossédée de l'Europe centrale et orientale, privée des positions solides qu'elle avait acquises, malgré tout notre Eglise Hors-Frontières, étant elle-même une réfugiée, demeurait comme auparavant l'espérance, le guide et le centre de la vie et de l'activité des Russes émigrés. Car notre Eglise restait l'authentique Eglise du Christ.
Posons-nous la question : l'Eglise officielle en Russie, remplit-elle ce rôle qui devrait être le sien, si seulement elle était l'Eglise authentique? A l'évidence, non. On peut même affirmer nettement que le Patriarcat de Moscou n'en a pas la capacité. Il ne saurait diriger son peuple. Tout ce dont il est capable est d'être à la traîne de ses fidèles en réalisant des concessions que ceux-ci lui arrachent.
La direction du Patriarcat louvoie en s'adaptant aux besoins de l'instant sans jamais pouvoir être ce qu'elle devrait être, si seulement elle était l'Eglise authentique. Ce que fut, par exemple, l'Eglise russe pendant le Temps des troubles : centre de la conscience nationale au milieu de la ruine et de la désolation ambiantes. Alors que la période actuelle est pire que celle du Temps des troubles il y a quatre siècles…
Ainsi, c'est aux fruits que l'on peut définir ce qui est authentique et ce qui ne l'est pas…
Si l'on nous fait remarquer tel ou tel essor en Russie, là une église ouverte au culte, là un monastère restauré, ailleurs des cours d'instruction religieuse mis en place, - tout cela n'est nullement à mettre au crédit de la direction du Patriarcat, mais c'est le fait de quelques enthousiastes désintéressés ou de prêtres zélés qui, bien évidemment, méritent notre admiration et notre joie.
"Aidez donc le Patriarcat", peut-on nous dire. Nous avons, à cette objection, une réponse fondée sur l'expérience, à savoir que la meilleure aide que nous puissions fournir à l'Eglise officielle est notre propre existence!
En effet, le Patriarcat est sans cesse obligé de compter avec nous, de nous copier, de s'orienter par rapport à nous, de réfréner le degré de ses iniquités par crainte de réactions de notre part. Nous pourrions sans peine illustrer ce propos par une multitude d'exemples. Nous faisons en quelque sorte office de frein salutaire dans son glissement aveugle et insensé…
Mais cela ne peut être vrai que tant que nous existons.
Que nous venions à disparaître ou à nous fondre dans la masse informe de l'Eglise officielle, nous perdrions immédiatement tout notre sel, toute notre force et notre aptitude à servir de frein. Cela ne manquerait pas de délier totalement les mains du Patriarcat, et pas uniquement dans le domaine de l'œ-cuménisme…Qui peut dire vers quels abîmes il pourrait alors être entrainé… Qu'en adviendrait-il et du Patriarcat et de l'Orthodoxie en Russie?
Ainsi donc, dans ce domaine, tout m'apparaît à la fois clair et ferme.

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Durant toutes mes années de prêtrise, je me suis toujours senti Russe et heureux de l'être. Mais je sais que le Seigneur amène chacun de nous à œuvrer dans des endroits différents, au milieu de peuples divers. C'est pourquoi je me suis toujours tenu au principe selon lequel, me trouvant dans un environnement où une langue autre que le russe - français, par exemple - était davantage comprise par les fidèles, je célébrais, enseignais avec plaisir dans cette langue.
Il est possible que dans mon activité pontificale je sois encore amené à m'en tenir à cette attitude.

Je me tiens présentement devant vous, Hiérarques de Dieu, avec crainte et tremblement ayant pleinement conscience de ma faiblesse spirituelle et physique, ainsi que de mon indignité. Je sais également que "la Grâce Divine guérit les faiblesses et supplée aux déficiences", selon la prière prononcée lors de l'ordination. Mais je sais que ce don de la Grâce n'est pas automatique. Cette Grâce doit être méritée, sans cesse ravivée en soi. Elle doit être multipliée. Je vous demande de m'aider à y parvenir.



Allocution de Mgr.Vitaly, métropolite de New-York, lors de la remise du bâton épiscopal à l'évêque nouvellement consacré, Séraphime de Lesna.

Reçois ce bâton afin de paître et sauver ton peuple. Ce bâton renferme la fermeté et la misericorde. En cela consiste aussi le service épiscopal. Et particulièrement : il faut parfois savoir dire "non". Il peut être difficile quelquefois de dire "non" ou "défendu".

C'est un mot très désobligeant. Mais il faut savoir comment le dire. Si tu le dis de tout ton cœur, c'est-à-dire avec un cœur aimant, alors le sens se perdra, mais la fermeté restera. et toi, tu transmettras alors ton "défendu". Cette expression apparait toujours pénible à dire, mais il faut la dire !

Mais tout dépend de ton cœur. Il faut savoir comment le dire, de sorte que cela soit de tout cœur. Si tu le dis sereinement, alors tu transmettras cette sérénité à ton enfant. Et ton enfant t'obéira.

Mais en même temps c'est le bâton de la miséricorde. Un bâton autre, à deux tranchants ! Et de la miséricorde et du châtiment !

Que le Seigneur t'aide à te remplir de cette sagesse.
Unis en toi et l'un et l'autre. Cela est si indispensable en nos jours.
Que le Christ te garde.

 

 


 

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