Sermon du Métropolite Arsène suite au bombardement de la laure de Sviatogorsk en Ukraine
https://youtu.be/ZE3y7UnAgDM
Lien pour la vidéo en russe
Sermon
du Métropolite Arsène de Sviatogorsk
le
jour du Triomphe de l’Orthodoxie 2022
après
la nuit de bombardement de son monastère.
Le Triomphe de l’Orthodoxie…
Mes Frères et Sœurs, aujourd’hui nous sentons plus que jamais le sens de cette
fête. Dans les Psaumes de David, nous trouvons l’expression suivante : « Je
me suis trouvé dans l’affliction et la douleur et j’ai invoqué le nom du
Seigneur ». Souvent, comme disaient nos ancêtres, « le malheur
est à la porte et nous recourons à Dieu ». Et aujourd’hui, nous disons
avec le Juste Job : « Le Seigneur a donné, le Seigneur a enlevé.
Que le nom du Seigneur soit béni depuis maintenant et dans les siècles. »
Il est facile de remercier Dieu lorsque la société est en paix, lorsque nous
sommes comblés de biens de toute sorte, lorsque nous sommes en bonne santé. Il
est alors facile de dire : « Gloire à Toi, Seigneur! ». Mais
lorsqu’on rend gloire au Seigneur dans l’affliction, on imite Saint Job le
Juste, on imite beaucoup de Saints agréables à Dieu qui supportaient les
adversités dans cette vie en Le remerciant. Aujourd’hui nous prenons conscience
du Triomphe de l’Orthodoxe qui reste vivant grâce à la force de notre foi, à
travers la force de notre amour pour Dieu, lorsque nous mettons en Lui tout
notre espoir. Nous prenons conscience de la puissance de l’action de la Grâce,
lorsque ces vertus ressuscitent en nous. Et elles ressuscitent en nous lors
d’événements de ce genre.
Aujourd’hui, Mgr Hilarion a
téléphoné et a demandé avec des larmes dans la voix comment nous allons au
Monastère, comment vont les pèlerins, les réfugiés, les Frères. Il a dit de
vous transmettre son salut et sa bénédiction, il a dit de mettre tout notre
espoir dans la Protection de la Mère de Dieu. Elle n’a jamais abandonné Son
Monastère, et ne l’abandonnera pas non plus dans le futur. L’Hermitage, le
Monastère et la Laure de Sviatogorsk a traversé beaucoup d’épreuves. Il faut croire
que nous devons encore supporter des temps comme ceux d’aujourd’hui, afin
d’être capables d’estimer les périodes de paix.
Aujourd’hui, mes Frères et
Sœurs, nous fêtons le Triomphe de l’Orthodoxie en mémoire du 7ème
Concile Œcuménique, de la restauration de la vénération des icônes et de la
condamnation de l’iconoclasme qui près de 200 ans bouleversa l’Église du Christ
et persécutait ses enfants fidèles à la vénération des icônes. Et lorsque
finalement on rétablit la vénération des icônes, les gens sortirent pleins
de joie leurs icônes qu’ils avaient
sauvées de leurs cachettes, les portant dans la rue, et célébraient en pleurant
des Offices d’intercession devant elles. C’est en mémoire de cela que fut
instaurée la fête du Triomphe de l’Orthodoxie.
Les gens avaient souffert des persécutions, des adversités. On les
envoyait en exil, on les mettait en prison, on les torturait, comme par exemple
les Saints Théodore et Théophane les Marqués, auxquels en raison de leur
fidélité à la vénération des icônes, on grava sur le visage des versets
injurieux. Et ces deux Moines par la suite, pour cacher leurs visages
défigurés, cousirent à droit et à gauche de leur klobuk des bandes de
tissu. Et jusqu’à aujourd’hui les Moines
portent sur leur klobuk ces bandes de tissu sur les côtés en mémoire de ces
frères qui furent torturés pour le dogme de la vénération des icônes. Pendant
cette période, on brisait souvent les icônes sur la tête des ceux qui les vénéraient. Tous les Monastères à Constantinople furent fermés, et les fidèles Orthodoxes
furent obligés de s’enfuir vers la rive septentrionale de la mer Noire, en
Crimée, dans le Caucase, en Cappadoce, dans le Sud de l’Italie, en Sicile… Ils
abandonnaient leur patrie pour pouvoir continuer à vénérer les icônes et conserver la pureté de
l’Orthodoxie.
Aujourd’hui aussi, mes
Frères et Sœurs, notre foi, notre confiance en Dieu, sont mises à l’épreuve.
Qui sait? Peut-être pour ces épreuves, ce bouleversement que le Seigneur a
permis que nous vivions, Il a pardonné un, ou même plusieurs des péchés de
chacun de nous. Peut-être pour ce que nous avons souffert aujourd’hui et parce
que nous sommes quand même venus à l’église pour remercier Dieu et prier à
l’Office, peut-être qu’Il nous pardonnera tous les péchés de notre vie. Nous ne
savons pas comment opère Sa miséricorde dans notre affliction. Nous
l’apprendrons plus tard, dans l’autre vie. Mais maintenant, nous savons que le
Seigneur ne permet rien par hasard. Et s’Il permet quelque chose à cause de nos
péchés, nous devons le supporter comme le Juste Job : si nous avons reçu
les bienfaits du Seigneur, comment ne pas accepter et le malheur? Car nous
sommes dignes de tous les malheurs, en raison de nos péchés et souvent de notre
injustice aux yeux de Dieu. Et nous commettons tant de péchés…
Je vous ai déjà dit, mes
Frères et Sœurs, qu’il n’est pas terrible d’être tué. Quand on tue quelqu’un,
il vivra dans l’éternité, dans une autre dimension. Il n’est pas terrible
d’être blessé. Quand on est blessé, cela fait mal, et la douleur libère
d’autres sentiments. Ce qui est terrible, c’est quand les gens souffrent, et tu
voudrais de tout ton cœur les aider, et tu comprends que tes capacités humaines
sont limitées. Mes Dieu, Lui, a des capacités illimitées. Dieu peut nous aider,
il faut seulement parler avec Lui par la prière. Aujourd’hui plus que jamais,
il nous est indispensable de parler avec Dieu. Nous aider l’un l’autre.
Vous savez, lorsqu’il y a 27
ans nous sommes arrivés ici au Monastère, il était encore plus démoli. Mais par
les prières de ceux qui aiment ce saint lieu, grâce aux donations, avec le
labeur et l’abnégation, ce Monastère ressuscita des ruines et est devenu une
merveilleuse Laure. Nous reconstruirons les ruines. L’important c’est que dans
nos âmes et dans nos cœurs il n’y ait pas de ruines. Que nous y restions pour y
construire la demeure de Dieu dans notre cœur, dans notre esprit dans notre
âme. Mgr Hilarion a dit ces paroles : « Mettez de côté l’émotion,
mettez en avant la sagesse et tachez de vivre ce moment avec espoir dans l’aide
de Dieu. »
C’est pourquoi, que Dieu
nous aide aujourd’hui à célébrer le moleben en souvenir du Triomphe de
l’Orthodoxie. C’est un moleben particulier. Nous y louons ceux qui ont conservé
dans toute sa pureté la foi Orthodoxe, nous
y proclamons éternelle mémoire à ceux qui ont gardé les dogmes et la pureté de
la foi. Nous y prononçons aussi des anathèmes. Mais l’anathème ce n’est pas une
malédiction, comme certains le pensent. Le sens de cette parole est le
suivant : lorsque quelqu’un nous scandalise par son enseignement erroné,
par son impiété, nous lui disons : « éloignez-vous de nous et ne
soyez plus avec nous. Et nous leur expliquons la raison pour laquelle nous ne
désirons pas être avec eux, la raison pour laquelle nous voulons qu’ils s’éloignent
de notre entourage. Car si nous continuons à les fréquenter, nous risquons de
perdre le principal, Dieu et notre âme. Voici le sens de cette parole. Mais
nous proclamerons aussi « longue
vie » à tous les fidèles enfants de la Sainte église Orthodoxe.
Vous connaissez, mes Frères
et Sœurs, l’amour de notre Mère l’Église. Je vous ai déjà dit qu’elle
commémorait et les communistes, et les membres du komsomol, et les ? L’église
commémorait même les persécuteurs de l’église car leur mère ou leur grand-mère
inscrivait leur nom sur les listes à commémorer. L’Église n’a jamais refusé de
commémorer lorsque les gens venaient demander de prier pour leur fils ou leur
fille qui étaient tombés dans la prostitution ou dans n’importe quelle
iniquité, et n’écoutaient pas les parents. L’Église n’a jamais refusé de
commémorer ceux qui commettaient quelque crime, et priait toujours avec leurs
mères ou leurs femmes en pleurs. La même chose pour ceux qui se droguent. Nous
avons souvent commémoré des noms comme « détenu X », sans savoir
pourquoi cette personne avait été condamnée à la prison. Sa mère l’aimait et
avait inscrit son nom pour qu’on le commémore, et l’Église, en mère encore plus
aimante, priait pour tout le monde.
Et tout à coup, sur ce fond,
retentissent des voix : « Nous allons cesser de commémorer le
Patriarche Cyrille ». Nous commémorons tout le monde, les criminels, les
gens qui sont loin de Dieu, et même les persécuteurs de l’Église. A l’époque du
communisme, nous commémorions tout le monde. Cela fait huit ans que nous lisons
une prière pendant la Liturgie pour la paix en Ukraine. Cette prière à été
écrite par le Patriarche Cyrille. Celui-ci dans sa dernière déclaration a dit
que toutes les guerres sont une chose
diabolique. Il a appelé à la réconciliation et à tout résoudre par des
négociations et non pas en s’entretuant. Aujourd’hui, mes Frères et Sœurs, nous
prions pour tout le monde, et aussi pour le Patriarche. Il est Patriarche non
seulement pour le peuple russe et ukrainien, mais aussi pour la Biélorussie, et
pour les Orthodoxes de la Baltique, et pour la Moldavie Orthodoxe, et pour
l’Église Russe Hors Frontières qui a des centres à New-York, à Seattle, à San
Francisco, en Australie, à Berlin, à Londres, il y a une Cathédrale de la
Dormition, et partout on le commémore. Et nous de même. D’autant plus qu’il n’y
a pas si longtemps, sa Sainteté a téléphoné pour transmettre sa bénédiction et
nous raffermir, s’intéressant à nos épreuves et nos afflictions.
Aujourd’hui nous vivons une
situation que l’Église a déjà vécue. Vous vous souvenez des divisions entre les
différentes principautés. Lorsque les Princes de Kiev luttaient contre ceux de
Tchernigov, et vice-versa, ceux de Moscou contre ceux de Tver, ceux de Riazan
contre ceux de Moscou, lorsque 74 princes de Vladimir et de Souzdal se
réunirent pour saccager Novgorod. Cela est déjà arrivé dans l’histoire. On
tuait les gens, des villes étaient détruites, on saccageait et détruisait des
églises. Tout cela est déjà arrivé. Mais alors, l’Église demeurait une. Elle
s’efforçait tant qu’elle pouvait d’appeler à la paix, de prier tant qu’elle
pouvait pour les vivants et les défunts.
Sa miséricorde recouvrait tout le monde. Je me souviens du Saint Métropolite Tikhon qui est décédé en 1925. A son époque,
lorsque les soldats de l’armée blanche vinrent
prendre sa bénédiction, il ne les bénit pas. Il ne bénissait ni les
soldats de l’armée rouge, ni ceux de l’armée blanche. Il ordonna de prier pour
tous, et pour les rouges, et pour les blancs, et pour le repos de ceux qui
étaient tués dans cette guerre civile. Le Patriarche Tikhon aujourd’hui repose
dans le Monastère Donskoï et ses reliques sont incorrompues. La sainteté de sa
vie et de ses paroles sont confirmées par l’incorruptibilité de ses reliques.
Et nous aussi aujourd’hui,
mes Frères et Sœurs, nous souvenant des paroles de l’Évangile, nous prions pour
tous. Nous dénonçons les erreurs dans la foi, ceux qui se sont éloignés de
l’Orthodoxie, ne la conservant pas dans toute sa pureté. Mais en même temps,
nous nous efforçons nous-mêmes de conserver cette Sainte Orthodoxie et de
rester avec Dieu.
Que le Seigneur, mes Frères
et Sœurs, aujourd’hui tourne Son regard
sur l’affliction de chacun de vous, qu’Il essuie les larmes de chaque personne
qui se tient dans l’église, entende le moindre soupir, voie le cœur brisé de
beaucoup d’entre nous aujourd’hui. Car nous ne comprenons pas ce qui se passe
et à quelle folie est arrivé le monde. Une personne ne peut pas changer cette
situation. Dieu Seul peut changer les cœurs, l’esprit des gens et les diriger
afin qu’ils vivent selon Sa volonté. Aujourd’hui, c’est le moment de prier. Ce
n’est pas le moment de se faire des reproches les uns aux autres, de nous
insulter, d’avoir des émotions négatives. Aujourd’hui, c’est le moment de prier.
Et que le Seigneur fasse que cette prière soit entendue. Et elle le sera. Car
le Seigneur entend tout particulièrement ceux qui prient dans une affliction
particulière. Et aujourd’hui, la Mère de Dieu entend chacun de vous. Elle nous
entend à tel point que beaucoup de Ses icônes de nos jours non seulement
pleurent, mais pleurent des larmes de sang. Cela montre qu’Elle prie pour
nous devant le Trône de Dieu en
transpirant du sang.
Et maintenant, commençons,
Frères et Sœurs le moleben pour le Triomphe de l’Orthodoxie, nous renforçant
ainsi dans l’espoir. Nous sommes Orthodoxes, nous avons conservé la pureté de
la foi, et donc nous appartenons à Dieu. Et si le Seigneur permet que nous
supportions des afflictions dans ce monde, je le répète, qui sait, peut-être
pour cette épreuve d’aujourd’hui, Il a effacé les péché de chaque âme,
purifiant l’âme et la rendant capable de contenir la plénitude du Royaume des
Cieux. Amen!
Commentaires
Enregistrer un commentaire